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 Création d'une opérette écrite en déportation

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Audrey
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Audrey
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   Posté le 03-06-2007 à 18:24:56   Voir le profil de Audrey (Offline)   Répondre à ce message   http://lepetitmondedaudrey.alloforum.com/   Envoyer un message privé à Audrey   

Emouvante création de l'opérette écrite en déportation par Germaine Tillion


Répétition de l'opérette "Le Verfugbar aux Enfers"
le 1er juin 2007, au Châtelet, à Paris

Le Théâtre du Châtelet à Paris a fait un beau cadeau d'anniversaire à Germaine Tillion, centenaire depuis mercredi, en créant samedi soir "Le Verfügbar aux enfers", émouvante "opérette-revue" trempée dans l'humour noir qu'elle a écrite en déportation à Ravensbrück (Allemagne).

Trop faible pour se déplacer, l'ethnologue et résistante n'a pas pu assister à la première représentation de cette oeuvre sans équivalent dans l'histoire des camps nazis, et qui sera redonnée deux autres fois (16H et 20H) dimanche.

L'une de ses compagnes de déportation, Anise Postel-Vinay, 85 ans, a pris la parole sur scène et s'est dite "très émue" à l'idée de partager avec le public "cette belle page d'espérance humaine".

Résistante de la première heure, Germaine Tillion a été arrêtée en août 1942, puis déportée en octobre 1943 vers le camp de concentration pour femmes de Ravensbrück (Allemagne).

Considérée comme NN (pour "Nacht und Nebel", "nuit et brouillard" ), c'est-à-dire condamnée à disparaître sans laisser de traces, la Française appartenait à cette catégorie de prisonniers rebelles (les Verfügbar, littéralement "disponibles" ) qui, n'étant délibérément inscrits dans aucune colonne de travail, étaient corvéables à merci.

En octobre 1944, plutôt que de travailler au déchargement des trains, elle s'est mise à écrire "Le Verfügbar aux enfers", dissimulée au fond d'une caisse d'emballage, pour soulager sa détresse et celle de ses compagnes d'infortune, mais aussi faire acte de résistance. "Survivre, notre ultime sabotage", écrira-t-elle en 1946.

L'oeuvre a alors été dite et chantonnée par bribes, à la sauvette, mais jamais représentée. Longtemps, Germaine Tillion ne s'est pas souciée de la diffusion et de la postérité de ce manuscrit qui ne sera édité qu'en 2005, soit 60 ans après sa libération.

La baptême scénique de l'oeuvre confirme sa force et sa singularité. Le titre résume parfaitement la démarche de l'auteur en soulignant l'enfer des camps nazis tout en faisant un clin d'oeil à une opérette d'Offenbach ("Orphée aux enfers" ) : ici l'humour est noir et se teinte d'autodérision.

Quand Germaine Tillion évoque "un camp modèle avec tout confort, eau, gaz, électricité", le choeur répond "gaz surtout" en une réplique d'une ironie glaçante.

L'auteur n'a bien sûr pas composé les airs très variés (chansons scoute ou grivoise, "Habanera" de Carmen, "Danse macabre" de Saint-Saëns...) auxquels elle et ses codétenues se réfèrent, mais l'adéquation texte-musique révèle une grande culture musicale. Le "J'ai perdu mon Eurydice" de Gluck devient ainsi subtilement "J'ai perdu mon Innendienst", le précieux billet qui permet de rester au Block et de ne pas aller travailler...

Germaine Tillion décrit naturellement en ethnologue la vie à Ravensbrück. Mais elle se révèle aussi en dramaturge inspirée en inventant un personnage d'entomologiste qui dissèque à voix haute le Verfügbar, un "gastéropode" car "il a l'estomac dans les talons", nous dit-on.

La réalisation scénique (signée Bérénice Collet), qui est sur le même ton que le texte, est une réussite : les scènes se jouent avec efficacité devant une baraque concentrationnaire, bientôt surmontée d'une inscription grinçante et référencée ("Le travail, c'est la santé" ), lumineuse façon music-hall.

Le spectacle s'achève sur le noir complet et un long silence suffoquant. Quand la salle se rallume, le public fait un triomphe aux artistes, notamment à la jeune chef Hélène Bouchez, à des solistes épatants (Gaële Le Roi, Hélène Delavault...), aux choristes de la Maîtrise de Paris et de deux collèges de la capitale, dont la démarche a été autant éducative que musicale.

Cependant à l'applaudimètre, c'est une photo descendue des cintres qui remporte le plus grand succès : celle de Germaine Tillion.

(AFP - 03/06/07)
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Il va de soi que le sujet traité ici est on ne peut plus délicat. Personnellement, pratiquer l'humour sur le thème de la déportation me choque énormément.

Néanmoins, compte tenu du fait que c'est une déportée elle-même qui vient ici témoigner de la façon dont elle a dû tourner les choses en dérision à sa manière pour survivre, cela change la donne.

C'est donc dans ce contexte et pour cette raison que je porte cet article à votre connaissance. Je pense qu'il était utile d'apporter cette précision, afin de clarifier ma position dans ce domaine.


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