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L'HERBE DOUCE du Paraguay

Audrey
   Posté le 08-07-2007 à 02:51:21   

L'"herbe douce" du Paraguay ou le germe d'une révolution alimentaire


Des travailleurs nettoient les cultures d'"herbe douce"
le 27 juin 2007 près d'Asuncion

Dotée d'un pouvoir sucrant exceptionnel, une plante ancestrale du Paraguay, connue sous le nom d' "herbe douce" dans ce petit pays sud-américain, porte en elle le germe d'une révolution alimentaire.

Il y a plusieurs siècles, les indiens guaranis faisaient déjà tremper ses feuilles pour aromatiser leurs breuvages.
Ce sont désormais les géants de l'industrie qui se penchent sur le berceau de cet or vert, trois cent fois plus puissant que le sucre de canne et sans la moindre calorie.

Les groupes américains Cargill, un des premiers fournisseurs alimentaires de la planète, et Coca Cola, l'empire des boissons sucrées, ont récemment dévoilé un partenariat pour fabriquer un édulcorant à base de "stevia rebaudiana bertoni", son nom savant.

"L'annonce de Coca Cola a éveillé un intérêt gigantesque", se félicite Nelson Gonzalez, patron de la "Chambre de la stevia", l'organisme regroupant les producteurs sous l'égide du ministère paraguayen de l'Industrie et du Commerce.

Le marché, développé en Amérique du Sud (Brésil, Argentine, Equateur) et en Asie (Chine, Japon, Corée), n'est pour l'instant que prospectif aux Etats-Unis et dans l'Union Européenne où la stevia n'est autorisée que comme complément alimentaire ou cosmétique, en attendant l'avis des scientifiques.

"La demande est énorme dans le monde entier. Mais le lobby du sucre veut freiner l'importation de ce produit révolutionnaire, au goût naturel et sans danger pour la santé", affirme M. Gonzalez, en allusion aux risques de cancer régulièrement évoqués pour les édulcorants chimiques comme l'aspartame.

Des études, réalisées par la Faculté de médecine de l'Université d'Asuncion, ont attribué une longue liste de vertus à cette plante à la fois anti-oxydante, anti-inflammatoire et anti-bactérienne, qui agit de manière bénéfique dans le cas de maladies comme le diabète, l'hypertension ou même les caries.

La "stévioside", la molécule complexe contenue dans ses feuilles, offre aussi au consommateur l'avantage sur les édulcorants chimiques de pouvoir être cuit puisqu'elle supporte une température de 200 degrés.

Mais ses promoteurs signalent bien d'autres usages. Mêlée à l'engrais, elle confère une saveur sucrée aux fruits. Comme fourrage, elle améliore la qualité du bétail.

En 10 ans, la culture de la plante, un petit arbuste de 60 cm de haut natif de la région tropicale dans le nord-est du Paraguay, est passée de 350 à 1 500 hectares. Les autorités espèrent au moins décupler cette surface d'ici cinq ans, visant une production d'environ 18 000 tonnes de feuilles séchées.

Or, un kilogramme de "cristal" de stevia, la poudre obtenue à partir de douze kilos de feuilles, peut s'exporter au prix de 40 à 100 dollars, suivant son degré de pureté.

Conscient du pactole pour cette nation agricole de 6 millions d'habitants où la pauvreté frappe près de la moitié de la population, le Paraguay a entamé une démarche internationale afin d'obtenir une "appellation d'origine".

Car, ironie de l'histoire pour ce pays roi de tous les trafics, ses plants de stevia ont été contrefaits en Asie depuis trente ans, et le premier producteur mondial n'est autre que la Chine, avec 20 000 hectares.

Pionnier de la stevia au Paraguay, la société Emporio Guarani, qui cultive la plante et en extrait l'édulcorant végétal à l'aide de longs alambics dans son usine de Luque (à 10 km d'Asuncion), ne semble pas s'inquiéter de la concurrence asiatique.

"La terre de la stevia est ici. Grâce à notre climat, on peut faire trois récoltes par an contre une seule en Chine", souligne sa gérante, Maria Teresa Aguilera, qui affirme avoir été contactée, depuis l'annonce de Coca Cola, par des "entreprises de tous les continents".

(AFP - 05/07/07)