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Dictons populaires ...et saints imaginaires

Audrey
   Posté le 23-08-2008 ŕ 03:00:09   


(Saint Laurent - peinture médiévale
détail tryptique Lorenzo Monaco, exposé au Petit Palais, à Avignon)




Dictons populaires ...et saints imaginaires

Les dictons populaires sont truffés de saints tous plus imaginaires les uns que les autres, qui n'ont jamais figuré sur le moindre petit calendrier.
Petit tour d'horizon et origine de quelques uns de ces personnages fictifs, meublant des expressions employées fréquemment...



Saint Lundi

Jadis, les ouvriers, les artisans et les artistes guettaient la Saint-Lundi avec impatience, dans plusieurs régions de France et de Belgique. Ce jour de chômage volontaire est, en effet, synonyme, dès le XVIIe siècle, de beuveries et de ripailles en prolongement du dimanche.
En Basse-Normandie, Saint-Lundi était considéré comme le patron des sabotiers, qui ne travaillaient pas ce jour-là.


Saint Glinglin

La légende populaire prétend que l'expression "à la Saint Glinglin" est née en Normandie, au début du XXème siècle. Un jour, un mauvais payeur déclare à son créancier qu'il réglera sa dette "à la Saint Glinglin". Le débiteur floué saisit la justice, qui rend le verdict suivant : "Attendu que la Saint Glinglin n'existe pas, mais que chacun sait que tous les saints non inscrits dans le calendrier sont fêtés à la Toussaint, le tribunal ordonne que le débiteur règle son créancier le 1er novembre prochain." On attribue parfois à l'expression une autre origine : autrefois, la croyance populaire voulait que l'âme des morts s'élève au paradis, lorsque les cloches sonnaient... donc à la Saint Glinglin.


Sainte Echelle

Parce qu'un maçon digne de ce nom ne se sépare jamais de cet outil de travail, les Cherbourgeois considéraient jadis la Sainte Echelle comme la fête des maçons. A Octeville, dans la Manche, on continue de fêter cette sainte inventée de toutes pièces, en mai. Car Sainte Echelle fait référence à un sens très rare du mot "échelle" : celui d'escalade. Elle évoque la montée au ciel du Seigneur, c'est-à-dire l'Ascension.


La femeuse ...Sainte Nitouche

C'est la patronne des prudes, de celles qui "prétendent ne pas y toucher", qui "font leur sucrée", ou "leur Sophie". Cette sainte de légende a vu le jour en 1534, sous le nom de "Saincte Nytouche", dans le Gargantua de Rabelais. En 1690, le Dictionnaire universel de Furetière a révélé que l'expression était également valable pour les hommes. Au Québec, le terme "nitouche" désigne, aujourd'hui, un petit saint de bois ou ceux qui "font leur petit saint de plâtre".


Saint Jamais

On fête ce saint farfelu de préférence le 36 du mois, aux calendes grecques, à Pâques ou à la Trinité, voire le jour où les poules auront des dents ! L'expression "à la fête de Jamais" est citée dans un texte, dès 1562. Elle apparaît encore, dans la région d'Issoudun, en 1864. Cette divinité mystérieuse brouille les pistes en affichant différentes orthographes : Saint Jamais s'écrit "Saint Jamaï" en Languedoc, et "Saint Jamès" en Gascogne.


Saint Houohaou

Dans le Finistère, les pêcheurs de Saint-Jacut-de-la-Mer et de Saint-Cast avaient coutume d'échanger des mots doux en mer. Les Jaguens traitaient les Câtins de "petits jaunes". Les habitants de Saint-Cast rétorquaient en traitant ceux de Saint-Jacut de "Houohaou". Ces derniers le prenaient pour une insulte suprême, car ils pensaient qu'on les accusaient d'aboyer en parlant, comme des chiens. A tort ! L'origine de l'expression "Houohaou" serait en fait liée au culte voué autrefois par les hommes de Saint-Jacut à un rocher, baptisé "Houohaou". Lorsqu'ils passaient devant, les pêcheurs avaient pour coutume de se découvrir en disant : "Saint Houohaou, donnez-nous du masqueriau."


Sainte Guillotine

Vous avez dit justice ? Pour son inventeur, le Docteur Joseph-Ignace Guillotin (1738-1814), la "machine à faire voler les têtes" était un progrès, parce qu'elle mettait un terme au privilège de la décapitation sur le billot, réservé à la seule aristocratie, et permettait aux criminels de tous les milieux sociaux d'être châtiés d'une seule et unique façon. A tel point que, dès 1793, la guillotine a fait l'objet d'une sanctification dans des rapports venus de la province. On alla même jusqu'à composer des litanies et des chants religieux en l'honneur de "Sainte Guillotine, devenue la protectrice des patriotes"...


Saint Souspir

Dans la région de Nice, on honorait autrefois un certain San Souspir. Derrière ce nom se cachait Saint Hospice, un ermite mort en 581, fêté le 16 octobre bien que disparu un 21 mai. Selon la légende, Saint Hospice, qui avait le pouvoir de guérir les maux de gorge, s'était claustré dans une tour, près du cap Ferrat. Les malades se présentaient à lui, via une lucarne, et des parrains plaçaient sous sa protection des enfants, en les faisant glisser jusqu'à lui par un étroit passage. Les villageois l'ont baptisé Saint Souspir, à cause des gémissements qu'il poussait, au fond de sa tour.


Saint Cochon

Voilà une trentaine d'années, on célébrait encore dans les campagnes l'abattage du cochon et sa fête traditionnelle. Souvent, le jour du sacrifice était personnifié et sanctifié sous le nom de Saint Cochon, Saint Boudin ou Saint Pourqui. Cette fête était une manière d'honorer l'animal qui procurait de la nourriture pour toute l'année. Dans le Loiret, une association a remis au goût du jour ces festivités, en 1981.



Sainte Marche

A Chérencé-le-Roussel, dans la Manche, les mères priaient Sainte Marche, pour que leur bébé réalise rapidement ses premiers pas. Sans doute en vain... car la statue n'était en fait qu'une statue de Sainte Marthe, dont le nom avait été estropié. Un comble...


Sainte Baudruche

En 1960, dans le Maine-et-Loire, une Sainte Baudruche était réputée guérir la coqueluche. Les mères se rendaient devant la croix qui lui était dédiée, à un carrefour. Elles déposaient à son pied une ou deux tartines de pain garnies de victuailles, et priaient Sainte Baudruche pour la guérison de leur enfant.


Saint Dormant

A Saint-Cyran-du-Jambot, dans l'Indre, on faisait appel à Saint Dormant, pour aider les enfants nerveux à retrouver leur sommeil. Ces derniers devaient toucher la statue et en faire le tour 3 fois, en priant.


Saint Vire qui vit

Dans l'Isère, on priait naguère Saint Vire qui vit, alias Saint Jacques ou Saint Jacquème, à l'emplacement d'une chapelle détruite, pour guérir les enfants atteints d'eczéma.


D'après le "Dictionnaire thématique et géographique des saints imaginaires, facétieux et sustitués", de Jacques Merceron (Ed. Le Seuil)
ThunderLord
   Posté le 18-09-2008 ŕ 23:54:01   

Alors là, c'est vraiment un comble... Y'a pas un saint qui puisse guérir des croyances idiotes ? xD
LK
   Posté le 19-09-2008 ŕ 00:08:20   

Je connais aussi une Sainte Gamelle à qui tout motard croyant adresse une p'tite prière avant de prendre la route...
ThunderLord
   Posté le 19-09-2008 ŕ 00:12:02   

Ouais ben vous feriez mieux de regarder la route au lieu de prier en roulant