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Le barrage de Méroé et l'archéologie soudanaise

Audrey
   Posté le 20-03-2007 à 00:59:21   

Le barrage de Méroé sort l'archéologie soudanaise de l'ombre


Les pyramides de Méroé

L'archéologie soudanaise, avec une course contre la montre pour sauver des eaux du barrage de Méroé des vestiges de civilisations anciennes de la Vallée du Nil, s'affranchit de l'ombre de sa grande soeur d'Egypte.

"Grâce au projet de sauvetage, l'archéologie soudanaise est en train de se faire connaître", souligne le chef des antiquités du Soudan, Salah Ahmed, qui tranche par son style calme avec son collègue médiatique égyptien, Zahi Hawas.

Le barrage de Méroé, projet controversé mené par les Chinois dans le nord du Soudan sur la quatrième cataracte du Nil, va former un lac de 160 km de long.

Les archéologues reconnaissent que des vestiges inestimables seront perdus à jamais, même s'ils mènent le plus important projet depuis celui qui a précédé la mise en eau du barrage d'Assouan dans le sud de l'Egypte dans les années 60.

"La zone est complètement inconnue des archéologues. Elle renferme un chapitre inconnu de l'histoire du Soudan et y aller était difficile en raison de problèmes logistiques",
ajoute M. Ahmed.

Les civilisations anciennes du Soudan ont érigé plus de pyramides que celles d'Egypte mais n'ont suscité que peu d'intérêt depuis leur défaite de la main du pharaon égyptien Touthmosis I (15e siècle avant JC).

"Bien sûr, il n'y a pas d'Abou Simbel ici", note M. Ahmed en référence au chantier gigantesque qui avait consisté à démonter et reconstituer le temple pharaonique du même nom près d'Assouan.

Il n'en reste pas moins que des équipes de Grande-Bretagne, de France, d'Allemagne, de Pologne et d'une dizaine d'autres pays, s'activent depuis cinq ans à fouiller la zone de Méroé avec des découvertes significatives.

Des découvertes permettent aux archéologues de comprendre le mode de vie d'anciens royaumes, dont celui de Kerma des "pharaons noirs" en Nubie (2 500 et 1 500 avant JC) qui dominèrent une partie de l'Egypte.

Elles permettent par exemple, selon M. Ahmed, d'établir que ce royaume était plus étendu et qu'il avait érigé des pyramides.

"La quatrième cataracte est un cas de figure très intéressant pour travailler sur les périodes de transition, qui ne sont jamais très sures", souligne un archéologue de la mission française (SFDAS), Vincent Francigny.

Les archéologues sont sous pression, les conditions de travail sont pénibles, et les tensions entre le gouvernement et les populations qui s'estiment lésées par le barrage ajoutent aux difficultés.

Les missions archéologiques peuvent conserver une partie de leurs découvertes, "surtout lorsqu'elles existent en plusieurs exemplaires", indique M. Ahmed, un francophone, tandis que l'Egypte tente de récupérer dans les musées du monde des pièces découvertes sur son territoire.

Au Soudan contrairement à l'Egypte, "toutes les équipes travaillent ensemble. Il y a une volonté de coopération, ce n'est pas une archéologie de compétition, c'est comme une grande famille", note M. Francigny.

L'immersion de la zone de recherche mettra fin aux campagnes en cours et une exposition des découvertes sera organisée en novembre 2008.

Mais une interrogation continuera de hanter les archéologues : existe-t-il ou non au fond des eaux une pierre de Rosette soudanaise ? Car l'une des plus vieilles écritures de l'humanité, le méroitique, n'a pas encore été déchiffrée.


Les découvertes faites jusqu'ici n'ont pas permis de déchiffrer cette écriture, alors que la pierre de Rosette mise au jour dans le nord de l'Egypte en 1799 avait permis de comprendre les hiéroglyphes.

(AFP - 19/03/07)