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Décès de l'ABBE PIERRE

Audrey
   Posté le 22-01-2007 à 18:53:16   

(AFP - 22/01/07)
Décès de l'Abbé Pierre


L'abbé Pierre, le 5 août 2005

L'Abbé Pierre, fondateur des compagnons d'Emmaüs et apôtre des sans-abri, qui s'est éteint ce matin à 05H25 à l'âge de 94 ans, des suites d'une infection pulmonaire.

Son allure, frêle silhouette drapée dans sa soutane ou son long manteau noir, portant béret, canne et godillots, son visage émacié à la barbe grise, son regard brûlant, son espièglerie, sa véhémence convaincante et son sens du tapage médiatique ont fait de lui l'une des personnalités préférées des Français.

Il avait fait du combat pour les déshérités le centre de son existence depuis les années 50.

De son vrai nom Henri Grouès, né le 5 août 1912 dans le quartier de la Croix-Rousse à Lyon, cinquième d'une fratrie de huit enfants, a été très influencé par son père, administrateur de sociétés textiles et membre charitable de la "Confrérie des hospitaliers veilleurs". L'abbé s'est souvent dit impressionné par ce père, catholique très pieux, qui chaque dimanche quittait son quartier bourgeois d'Ainay pour s'occuper de clochards et de mendiants en détresse, quai Rambaud à Lyon.

"Castor méditatif", son totem chez les scouts, a 14 ans lorsque la vocation le saisit. Plus tard, il décide d'abandonner la vie confortable à laquelle il était promis. En 1930, fasciné par la vie de François d'Assise, il choisit l'ordre le plus pauvre, devenant novice au couvent des Capucins. Il renonce à sa part d'héritage au profit d'œuvres de charité. Frère Philippe passera "sept ans dans son monastère, le froid, la solitude et la prière", rapporte une biographie. Mais il supporte mal physiquement et psychologiquement la règle de l'austère monastère franciscain de Saint-Etienne qui l'a accueilli et rejoint à contrecoeur la vie extérieure.

Il est ordonné prêtre en 1938 dans la chapelle du collège jésuite de Lyon. Atteint d'une pleurésie alors qu'il a été mobilisé comme sous-officier en Alsace, il est nommé aumônier de l'Hôpital de la Mure (Isère) par l'évêque de Grenoble. Il est ensuite vicaire auxiliaire à la Côte-Saint-André (Isère), en charge d'un orphelinat. En 1940, il est vicaire à la cathédrale de Grenoble. Il cache deux juifs rescapés d'une rafle, qui se présentent à lui, et, en 1942, il fait passer en Suisse des juifs avec des faux papiers qu'il contribue à imprimer.

Grâce à ces documents, l'abbé Pierre met en place des filières d'évasion. Il réussira à exfiltrer vers la Suisse dans une fausse ambulance, Jacques De Gaulle (1893-1946), l'un des trois frères du chef de la France Libre, gravement malade et qui était recherché par la Gestapo. Avec l'instauration du Service du travail obligatoire (STO) en février 1943, l'abbé Pierre vient en aide aux réfractaires. Il participe aussi à la mise en place de maquis dans le Vercors et en Chartreuse et prend plusieurs noms d'emprunt avant de devenir pour toujours " l'abbé Pierre".

Arrêté en mai 1944 par les Allemands à Cambo-les-Bains (Pyrénées-Atlantiques), il s'échappe et rejoint Alger. Nommé aumônier sur le Jean-Bart en août 1944, il est nommé aumônier de la marine à Paris, l'année suivante. Ce sera son dernier poste dans l'Eglise.

A la Libération, il choisit la politique. Il est élu député chrétien-démocrate (MRP) de Meurthe-et-Moselle, jusqu'à sa démission en 1951. Il consacre ses indemnités parlementaires au financement des premières cités d'urgence.

Entre-temps, il s'est installé à Neuilly-Plaisance, en banlieue parisienne, dans une propriété en ruines qu'il remet en état.
C'est là qu'un jour de 1949, Georges, un ancien détenu, frappe à sa porte. "Je ne possède rien, mais si tu veux m'aider, nous pourrons en aider beaucoup d'autres", lui dit l'abbé Pierre. Ce sera l'amorce du mouvement Emmaüs fondé sur le principe de demander aux exclus de pourvoir eux-mêmes à leurs besoins en récoltant les surplus des nantis, rompant ainsi avec la charité traditionnelle.
Le mouvement des communautés Emmaüs, récupèrent des objets, les réparent et les revendent pour venir en aide aux exclus. Ces communautés accueillent aujourd'hui près de 4 000 compagnons en France. Le mouvement a essaimé dans près de 40 pays.

Hiver 1954 : une femme meurt de froid dans la rue. L'abbé lance un appel pathétique en faveur des sans-abri sur les ondes de Radio-Luxembourg qui suscite un gigantesque élan de solidarité. Le religieux comprend alors le poids des médias dans son combat contre "le chancre de la pauvreté". "Ils existent, il serait idiot de ne pas les utiliser", dit-il un jour avec candeur. Il aurait pu utiliser la formule avec les hommes politiques, qu'il n'hésitait pas à bousculer, de quelque bord qu'il soit. Lors d'une de ses dernières apparitions en public, il y a un an, il était allé à l'Assemblée nationale pour inviter les députés à ne pas toucher à un article de loi obligeant toutes les communes à construire au moins 20% de logements sociaux.

Revenu sur le devant la scène dans les années 80, il soutient Coluche et ses "Restaurants du cœur", martelant qu'"avoir faim à Paris est intolérable".
En 1994, 40 ans après son premier cri pour les sans-logis, l'abbé lance un nouvel appel, dirigeant sa colère non plus sur l'Etat, mais sur les maires des grandes villes, coupables d'impéritie en matière de logement des plus démunis. Tenace, il recommence en 2004. Toujours "sur le terrain", l'abbé soutient les occupations d'immeubles vides par les militant de l'association Droit au logement (DAL) ou par les Africains expulsés de l'église Saint-Ambroise à Paris en 1996. Son combat lui vaut la première place au classement du Top 50 des personnalités préférées des Français.

Seul bémol dans cette biographie immaculée, son soutien, en 1996, à l'écrivain révisionniste Roger Garaudy. L'abbé Pierre retirera ses propos et s'en expliquera dans Mémoire d'un croyant (1997).

Promu Grand officier de la Légion d'Honneur en 1992, il repousse cette distinction avec fracas (il ne l'acceptera qu'en 2001) pour protester contre le refus du gouvernement d'attribuer des logements vides aux sans-logis, coup d'éclat qui contribue à faire appliquer la loi de réquisition.

En marge de l'Eglise, il n'hésite pas à se prononcer en faveur du mariage des prêtres, de l'ordination des femmes et de l'homoparentalité. Dans ses mémoires, il a aussi avoué quelques entorses au voeu de chasteté. La hiérarchie catholique ne semble pas s'offusquer de ses prises de position.

Au soir de sa vie, le prêtre chiffonnier évoquait la mort comme "une impatience" : "La mort, c'est la sortie de l'ombre, disait-il. J'en ai envie. Toute ma vie, j'ai souhaité mourir".

Des voix se sont déjà élevées pour demander des obsèques nationales, notamment celle de l'ancien président de la République, Valéry Giscard d'Estaing.



Les chaînes de télévision rendent hommage à l'Abbé Pierre
Les principales chaînes de télévision françaises ont bouleversé ce lundi leur programmation, afin de rendre hommage à l'Abbé Pierre.

Sur France 2 et France 3, les journaux consacreront une grande partie de leurs éditions à l'Abbé Pierre et de nombreux flashs spéciaux reviendront sur son action, au long de la journée.

France 2 diffusera lundi soir à 20H50 "Hiver 54", un film de Denis Amar, avec Lambert Wilson et Claudia Cardinale.
A 22H45, le magazine d'informations "Mots croisés" présenté par Yves Calvi sera consacré au fondateur d'Emmaüs.
Audrey
   Posté le 22-01-2007 à 18:56:40   

Le président Jacques Chirac vient de décider qu'un "hommage national" serait rendu vendredi 26 janvier à l'abbé Pierre, dont les funérailles auront lieu le même jour en sa présence à la cathédrale Notre-Dame de Paris, a annoncé l'Elysée.
ThunderLord
   Posté le 28-01-2007 à 00:40:09   

Il aurait été plus en accord avec la personnalité du défunt de faire un geste pour les plus démunis, en son honneur, mais bon, ils trouvent préférable de se faire de la pub grâce à sa mort... C'est aussi respectueux que de danser la gigue sur sa dépouille.
Audrey
   Posté le 28-01-2007 à 14:01:57   

A pas tort, là, Thunder...
ThunderLord
   Posté le 28-01-2007 à 19:45:36   

Moi ? Jamais